Interview "Plus près de vous" (CD aigle)
        1998 - "Transparence" - Thierry Demesière (RTL)


        Johnny Hallyday

        Une belle gueule, une belle allure, un costume noir. Il faut être un vrai rocker pour vieillir comme ça sans prendre de bide.
        Johnny Hallyday réussit enfin à ouvrir son cœur de rocker et nous dire ses blessures enfuies que seul jusqu'alors ses chansons exprimaient. Il nous révèle aussi une part de son mystère, la clé de son talent, son mal-être, sa foufrance.


        Je pense que chaque personne pas trop con ne peut pas dire très objectivement: " j'ai toujours été très heureux."

        Vous avez dit une phrase étonnante : " j'ai préféré pendant de longues années passer pour un imbécile parce qu'on ne se méfie pas des imbéciles. "

        Bon ben certain, ça m'a permis d'observer les gens.
        Je crois qu'il ne faut jamais décevoir les gens. S'ils pensent que vous êtes un abruti, laissons-les croire qu'on est un abruti. C'est pas grave. Jusqu'au jour où ils s'aperçoivent qu'on est pas si con que ça.
        Je connais beaucoup de gens instruits qui sont des abrutis.
        Ho non mais les fans sont loin d'être des imbéciles autrement je ne serais plus là.

        Vous avez une phrase très belle, vous dite que vous avez une vie de " destroyance ".

        Oui parce que je crois plus à la destroyance qu'au bonheur con et simple.
        Je suis quelqu'un de très compliqué dans ma tête. J'ai besoin que tout aille mal pour que tout aille bien.
        Mais je ne peux pas vous l'expliquer. C'est comme ça. Je préfère me relever avec des problèmes et surmonter ces problèmes pour remonter en haut plutôt que d'être un, comme disait Brel, beau et con à la fois. Et de te dire je me lève le matin, le ciel est beau, les oiseaux chantent et tout va bien. Je veux dire on a pas grand-chose à dire dans ces cas là.

        Ce qui nous frappe aussi c'est que vous êtes obsédé par l'idée de mourir mais de mourir comme un rocker, que votre mort ressemble à votre vie.

        J'ai peur de l'échéance de la mort. J'ai mon regretté Gil Paquet et qui était mon ami intime, nous avons commencé ce métier ensemble. Je l'ai vu dans la déchéance. Je l'ai vu mourir petit à petit. D'une façon qui est pas belle à voir. Moi c'est ça qui me fait peur.
        Mais mourir, quoi….

        On a l'impression que vous voulez une mort à deux cent à l'heure, dans une voiture.

        Mais non, mais je m'en fous personnellement de mourir. Ce qui me fait peur c'est de mourir en se sentant mourir et pas bien, quoi !

        Et quelle est votre rage de vivre, quelle est la revanche que vous voulez jouer. Est-ce que c'est ce père qui vous a abandonné à huit mois qui fait que vous ne serez jamais comblé, que vous courrez encore.

        Ca a été la plus grande meurtrissure de ma vie. Je pense que c'est ce qui a fait, ce qui a provoqué mon désarroi, un petit peu mon déséquilibre dans ma vie, dans ma vie d'homme et qui m'a marqué au fer rouge, et ça bon, je suis malheureusement né avec ça et ça, ça ne me quittera jamais jusqu'à mon dernier souffle.

        On ne guérit pas de ça ?

        Non je pense que c'est une chose dont on ne guérit pas, non

        Et pour de nombreux fans, de savoir que vous souffrez comme ça, que la nuit vous dormez mal, que vous avez besoin tout le temps de bouger, ça les a impressionnés.

        Je dors très mal parce que je suis quelqu'un d'angoissé. Je dors très mal parce que je n'aime pas la nuit. La nuit est une chose, est une chose qui m'angoisse terriblement. Je suis content quand le petit jour arrive parce qu'enfin je peux commencer à dormir paisiblement. Je sors beaucoup moins qu'on le dit. La plupart du temps je reste chez moi, mais bon ça n'empêche que la nuit est pesante. Je trouve que la nuit, la nuit c'est effrayant.

        Qu'est-ce qui vous effraie dans la nuit ?

        La nuit

        Et pourquoi vous êtes tant planqué jusqu'à maintenant

        Parce que j'en ai marre des images des guignols, j'en ai marre de tout ça et je voulais quand même montrer que derrière le chanteur, il y quand même autre chose, il y a aussi un homme.

        Johnny Johnny

        Johnny Hallyday avec Michel Coensolab. ( ? ? ? ?)

        Sa première rencontre avec Godard

        Il m'a invité à déjeuné pour parler du film qu'il voulait que je tourne avec lui " Détective ". On s'est assis et puis il m'a pas parlé. Il m'a dit : " tu veux manger quoi ". j'ai dit : " je ne sais pas, vous mangez quoi ? " il me dit : " je vais prendre une sole " j'ai dit : " bon, moi aussi. ". Et il a mangé et à la fin il m'a dit : " c'était bon, au moins ". il dit : " bon, alors on commence dans quinze jours, à dans quinze jours ". Voilà, c'était ma première rencontre et mon déjeuner avec Godard.

        Il n'a pas hésité à donner sa chance à un dénommé Stéphane Jeusty qui réalise son premier film. Il y a quarante-huit heures encore, Johnny était sur le tournage de " Pourquoi pas moi " au côté de Julie Gayet et Carmen Chaplin.

        Je crois à ce mec et je crois qu'un gars qui a tout à donner, c'est son premier film, est beaucoup plus intéressant à travailler avec que quelqu'un qui a déjà fait ses preuves.
        Je joue le père d'une adolescente de dix-huit qui vit dans un milieu un peu spécial. C'est une comédie. On pourrait vaguement penser à " Pédale douce " mais dans les mœurs inverses.

        Cinéma encore mais cette fois à Saint-Tropez où Johnny se trouve à l'heure actuelle pour tourner quelques clips avant de s'envoler pour Los Angeles où il doit commencer les répétitions des trois concerts du siècle en septembre prochain au Stade de France.

        J'ai grandi avec mon époque, j'ai grandi avec la musique, j'ai grandi avec le son d'aujourd'hui parce que, bon, le son aujourd'hui, même si on fait toujours du rock'n'roll, c'est malgré tout beaucoup plus sophistiqué que dans les années soixante et par les appareils, et par la musique et les synthés, enfin tout ça, quoi.

        Qu'est-ce que fait la longévité de Johnny parce que ça reste quand même Johnny la star.

        Je crois qu'il faut évoluer pour pouvoir durer. Il faut pas se… Moi je suis…, je ne reste pas en me disant, bon voilà, j'ai fais ça, c'est bien, et je continue à faire ça parce que ça marche. Je vais refaire la même chose. Non, j'aime bien changer et j'aime bien faire des choses que j'ai pas faites, en général.
        Vu d'en haut, le Stade de France est énorme à côté du Parc des Princes.

        Prochaine étape de ce marathon de rocker, seulement Paris l'attend, une soirée à tout casser.

        Très content, oui, surtout ma femme le plus

        Génial, ça fait trente-cinq ans que j'attends ce moment et j'en suis ravi. Je suis heureuse. C'est le plus beau jour de ma vie, voilà. Je suis ravie.



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